Le 6 août 1945, date que certains ont désignée comme « jour zéro », à 8 h 15 du matin, une bombe atomique balistique a été larguée sur Hiroshima. Le 9 août, à 11 h 02 du matin, une bombe atomique à implosion a été larguée sur Nagasaki.
Les conséquences furent catastrophiques. À Hiroshima, environ 140 000 personnes moururent entre ce jour-là et la fin de l'année 1945, tandis qu'à Nagasaki, 70 000 personnes périrent. Beaucoup furent tuées sur le coup par l'explosion et la force des radiations. Un grand nombre de survivants à l'explosion initiale sont morts par la suite de maladies liées aux radiations et au manque de soins médicaux. On estime que plus de 38 000 enfants ont été tués lors des deux bombardements atomiques. Les Hibakusha, comme on appelle les survivants, exposés aux effets de la radioactivié, ont souffert de symptômes aigus et nombreux sont ceux qui sont décédés dans les semaines, les mois et les années qui ont suivi. Compte tenu du manque de connaissances, à l'époque, sur les effets de l'arme atomique, les Hibakusha ont également souffert de discrimination dans le mariage et le travail, vivant dans la crainte constante de transmettre les effets des radiations aux générations suivantes.
Les explosions atomiques d'Hiroshima et de Nagasaki ont montré au monde entier la puissance catastrophique et destructrice des armes nucléaires. Pourtant, depuis lors, l'homme a construit plus de 70 000 armes nucléaires et effectué plus de 2 000 essais. Aujourd'hui encore, nous disposons d'un stock de plus de 12 500 de ces armes, chacune d'une puissance nettement supérieure à celles utilisées en août 1945.
Pendant la guerre froide, comme on le sait, le développement et la prolifération des armes nucléaires se sont accélérés. Après une période de démantèlement réciproque des deux grandes puissances (les États-Unis et l'URSS, aujourd'hui la Russie) pendant la détente, le nombre d'États dotés de l'arme atomique a toutefois augmenté, faisant resurgir la menace nucléaire. De nouveaux défis et de nouveaux risques apparaissent : les États dotés d'un arsenal nucléaire continuent de considérer les armes nucléaires comme des moyens de dissuasion stratégiques essentiels, mais aussi comme des armes de dernier recours permettant d'empêcher les changements de régime ou les invasions étrangères. Cela signifie que certains pays cherchent à se doter de l'arme atomique pour garantir leur existence.
Depuis les années 2000, les progrès dans le processus de désarmement ont marqué le pas. Le Traité sur l'interdiction des armes nucléaires, adopté par l'ONU en 2017, a tenté d'y remédier en visant l'élimination totale de ces armes. Cependant, les pays dotés d'un arsenal nucléaire n'ont pas adhéré au Traité, préférant discuter entre eux, sur la base de réductions mutuelles et jamais d'une élimination totale. Au contraire, le traité souligne la nature inhumaine des armes nucléaires et vise à l'abolition du nucléaire sous l'impulsion de la société civile internationale et des organisations pacifistes. Il n'y a pas eu non plus d'accord sur la meilleure stratégie à adopter pour éviter les erreurs, surtout maintenant que nous sommes entrés dans l'ère de l'intelligence artificielle.
Pendant la crise de Cuba en 1962, le monde a frôlé la guerre nucléaire, mais il y a eu d'autres moments où le risque était élevé. On peut se demander si le fait de confier des systèmes d'armes à l'IA n'augmente pas ce danger. Le modèle de dissuasion mutuelle semble avoir perdu de sa crédibilité depuis que l'on a commencé - comme dans le cas de l'Ukraine - à parler d'« arme atomique tactique », en la considérant simplement comme une arme plus puissante que les autres et en banalisant le risque nucléaire. En réalité, il n'y aura jamais de vainqueur dans une guerre nucléaire, même limitée.
Le mécanisme pervers de la guerre, qui la rend infinie, devient encore plus dangereux si l'on considère l'utilisation de ces armes. Cependant, les armes nucléaires sont interdites par le droit international, au même titre que les armes chimiques et biologiques. C'est de là qu'il faut repartir, en se souvenant des événements tragiques d'il y a 80 ans, en commémorant les centaines de milliers de victimes et le triste destin des Hibakusha.
[traduction de la rédaction]
[ Marco Impagliazzo ]